"Il m'enfonçait la tête dans la poubelle, me traitait de merde", Samantha témoigne contre les violences conjugales

Samantha a 25 ans quand elle rencontre celui qu'elle pense être l'homme de sa vie. Il est aimant, attentionné. Un rêve de petite fille. Elle décide de fonder une famille. La bascule opère à la fin de son 3e mois de grossesse. Plongée dans l'enfer, elle porte plainte et espère... Mais la gendarmerie n'arrête pas la bonne personne. Récit.

"Il m'enfonçait la tête dans la poubelle, me traitait de merde", Samantha témoigne contre les violences conjugales
© Samantha

Entre le 1er janvier et le 1er septembre 2019, 100 femmes ont été tuées sous les coups de leur conjoint ou de leur ex-conjoint. Alors que le Grenelle de lutte contre les violences conjugales a débuté ce 3 septembre, nous avons choisi de donner les paroles à celles qui souffrent, cherchent une issue et se battent pour se reconstruire. Leurs témoignages sont nécessaires. Voici celui de Samantha, 33 ans, qui vit en région parisienne. Un soir, épuisée par son travail de commerciale, elle se blottit contre son partenaire. Il la regarde droit dans les yeux, et sans sourciller, lui dit : "Tu me dégoûtes". Ces mots précéderont d'autres mots toujours plus violents. Et des coups.

"Tout a commencé lors de ma grossesse. Il ne cessait de me rabaisser, de m'humilier. Pourtant, en parallèle, il était présent, il m'aidait beaucoup à la maison. Je me disais qu'il était peut-être stressé, lui aussi, par l'arrivée de notre petite fille ? Mais avec les mois, il est devenu de plus en plus distant. Paradoxalement, les disputes étaient de plus en plus régulières. Il quittait le domicile pour plusieurs jours, me laissant seule avec ma fille. J'avais honte, je n'en parlais pas. Comment l'image que je me fais de la vie de famille, depuis l'enfance, peut-elle être bafouée à ce point ?

"Des mots violents, il est passé aux mains. Il me jetait au sol, me prenait par les cheveux"

Il revenait toujours. Des allers-retours. Moi, je n'attendais que ça. Qu'il revienne, que ça fonctionne. Mais des mots violents, il est passé aux mains. Il me jetait au sol, me prenait par les cheveux, m'enfonçait la tête dans la poubelle, me traitait de merde en me donnant des coups de genoux dans les tempes. J'ai cru connaître la mort un soir. Je sais que ce que l'on ressent quand elle s'approche. Ce soir où je suis rentrée tard d'un dîner entre collègues, qu'il m'a donné un coup de coude dans le dos alors que je venais de m'endormir. Il m'a insultée, est monté violemment sur moi, s'est frotté à moi. A tenté de m'étouffer.

Je suis allée porter plainte. Quelques jours plus tard, j'ai reçu un appel. Le message vocal était clair. C'était la gendarmerie. Il avait été arrêté ! Mais c'était impossible : il était à côté de moi, à quelques mètres de moi ! J'ai tenté de joindre à plusieurs reprises la gendarmerie pour leur dire qu'il y avait erreur. Mais on ne pouvait jamais me parler, on devait me rappeler. On me rappelait toujours au mauvais moment, quand mon ex était là, qu'il m'épiait. Je n'espérais que ça, les avoir en ligne, leur dire que mon bourreau était là, à mon domicile, qu'il fallait m'aider. Malgré mes tentatives, je n'ai jamais réussi à prévenir la gendarmerie.

"Il était parti, avait vidé mon compte en banque"

Après ça, j'ai cru connaître le répit quand nous avons décidé de rompre. Il est parti. Mais il s'est rapidement séparé de sa nouvelle compagne. Il était à la rue, je n'ai pas pu le laisser dehors : ma fille me le pardonnerait-elle ? Nous avons décidé de vivre en colocation. J'ai instauré des règles strictes qu'il n'a jamais respectées. L'emprise est devenue financière : il ne payait rien, ne travaillait plus. Il a abandonné son poste sans m'en avertir pour rester à la maison du matin au soir, et pour que moi, je bosse et ramène de l'argent. Les tensions sont immédiatement revenues. Les coups sont revenus. Il me frappait devant notre fille. Jusqu'au matin où je découvre un mot, ce mot : "Je te quitte". Il était parti, avait vidé mon compte en banque. Je suis allée porter plainte. J'ai appris ce jour-là que ma première plainte avait été égarée.

Aujourd'hui, quatre ans plus tard, je me reconstruis. J'ai rencontré un homme formidable, qui est devenu le papa de ma fille. Voilà, je m'appelle Samantha, j'ai 33 ans, je suis la maman d'Emma, 6 ans, et je suis en vie."