Alisha, piégée ? Les ados mis en détention pour "assassinat"

[Mis à jour le 11 mars à 10h46] Les deux adolescents responsables de la mort d'Alisha, 14 ans, retrouvée morte dans la Seine à Argenteuil, ont été mis en examen pour assassinat, le soir du 10 mars. Ils ont été placés en détention provisoire, selon BFMTV. Ils risquent 20 ans de prison et bénéficient de l'excuse de minorité.
"Le Parquet retient la piste de l'homicide volontaire avec préméditation", a annoncé Eric Corbaux, procureur de la République de Pontoise, face aux médias, le 10 mars. Alisha, retrouvée morte le 8 mars à Argenteuil, dans le Val d'Oise, a bien été frappée, puis jetée et noyée dans la Seine, selon les premiers éléments médico-légaux. Les deux collégiens en couple, mis en cause dans la mort de la victime, ont été déférés devant un juge d'instruction à Pontoise, après leur garde à vue.

Alisha et l'un des deux collégiens ont été brièvement en couple en début d'année. Après leur rupture, le garçon avait entamé une nouvelle relation avec une autre collégienne, l'autre adolescente responsable de la mort d'Alisha. C'est à ce moment que le jeune couple aurait commencé à harceler la victime.

Alisha, victime d'un guet-apens

Quels éléments permettent de retenir la piste de l'assassinat ? Avant le meurtre d'Alisha, "des SMS ont été échangés entre le jeune homme et la jeune fille où ils évoquaient quelque chose à faire avec la victime", a expliqué le procureur.

La jeune fille impliquée dans le meurtre aurait donné rendez-vous à la victime le 6 mars, mais la collégienne n'était pas disponible ce jour-là. Alisha aurait donc préféré la rencontrer le 8 mars, à la gare d'Argenteuil, sans se douter qu'il s'agissait d'un guet-apens. 

La jeune fille aurait alors conduit Alisha au niveau du Quai-Saint-Denis. Puis, le jeune homme, qui s'était dissimulé "derrière un pilier" aurait attaqué la victime et donné "des coups par surprise".

Plusieurs "coups de pied et de poing" dans le dos et à la tête auraient été portés à Alisha alors qu'elle était au sol, mais uniquement par le jeune homme. 

Pas de "remord" de la part des adolescents ?

La victime était "consciente" et "gémissait" avant qu'elle ne soit poussée à l'eau. L'objectif des deux collégiens était de faire disparaitre les traces, d'où leur initiative de jeter la jeune fille dans la Seine.

Après ce sinistre acte, le couple d'adolescents seraient rentrés au domicile du jeune garçon pour changer de vêtements et seraient ensuite partis déjeuner à Paris. 

"Ils n'ont pas fait part d'un remord immédiat", a ajouté le procureur de la République.

Alisha, victime de harcèlement

D'après les parents de la défunte, Alisha aurait été harcelée, notamment par les deux adolescents, au sein du lycée où elle étudiait, le lycée professionnel Cognacq-Jay d'Argenteuil. Les trois adolescents étudiaient dans une section de Troisième qui préparait aux formations professionnelles.

Pourtant, l'établissement assure qu'aucun fait de harcèlement scolaire n'a jamais été relevé. La représentante du syndicat Unité SGP police du Val d'Oise a évoqué, elle, un "différend sur les réseaux sociaux", selon Europe 1. 

Mais selon des témoignages d'élèves à France Bleu Paris, la défunte se faisait harceler, notamment sur les réseaux sociaux. 

Bagarre, photos en sous-vêtements, histoire de couple...

Certains parlent même d'une bagarre entre elle et l'adolescente en garde à vue, qui serait survenue au lycée, moins d'une semaine avant sa mort. 

Alisha était en couple avec un lycéen de 15 ans, au début de l'année scolaire. Mais après leur rupture, celui-ci a entamé une nouvelle relation avec une autre de ses camarades. Depuis, tous deux se seraient acharnés à "harceler" la victime, selon la famille. 

Le conflit se serait envenimé avant les dernières vacances scolaires. Des photos d'Alisha "en sous-vêtements" avaient alors circulé sur Snapchat. Ce sont les deux amoureux qui auraient diffusé les clichés.

Une affaire qui va jusqu'au conseil de discipline... qui n'a jamais eu lieu, puisque la jeune Alisha est décédée juste avant. 

Le désespoir d'une mère

Sa mère, en larmes, s'est écriée, désespérée à Franceinfo: "Pourquoi ont-ils tué ma fille ? Elle n'avait rien fait de mal". La victime s'était confiée à elle sur le harcèlement qu'elle subissait à l'école.

Une élève de Terminale a assuré que la lycéenne interpellée avait fait tourner "sur les réseaux sociaux qu'Alisha était 'une pute'. Cela n'a pas plu à la victime et ça a dégénéré. C'est parti en bagarre". 

"Alisha m'a parlé, elle m'a dit qu'elle se faisait harceler. Je l'ai vue se battre avec celle qui la harcelait devant les toilettes", a-t-elle ajouté avant de déclarer, en larmes: "C'est choquant, elle avait toute sa vie devant elle".

Le jour de sa mort, elle avait quitté les cours trois heures plus tôt. Il était donc possible qu'elle ait rendez-vous avec le couple, désormais placé en garde à vue.

Une épouvantable confession

C'est la mère d'un des adolescents en garde à vue qui aurait averti la police, après que son fils lui a fait la terrible confession. Il lui avait avoué qu'avec sa petite amie, il avait poussé l'adolescente dans la Seine, près du viaduc de Gennevilliers.

La mère s'est alors rendue sur les lieux indiqués, et a trouvé un gant et une mèche de cheveux, d'après le parquet de Pontoise. 

Paniquée, elle s'est rendue chez sa voisine. "Je la vois dans un état... Je pense rapidement qu'il y a un petit souci parce qu'entre voisins on se connaît depuis 10 ans (...) Elle me dit: 'Écoute, j'ai mon fils il me dit ça, ça, ça.' Je lui dis qu'il faut appeler la police. Elle était en panique, elle m'a dit: 'T'imagines, il est jeune'. Je lui ai dit que de toute façon, il fallait qu'il assume", a confié la voisine au micro d'Europe 1. 

"Je n'aurais jamais pensé dénoncer mon fils pour un truc comme ça. Depuis qu'il a rencontré sa copine, mon fils, ce n'est plus le même", a confié la mère de l'adolescent.

Les deux adolescents, interpellés

A son retour à son domicile, les deux adolescents avaient disparu. Elle a donc contacté la police, qui a pu retrouver le corps assez rapidement, vers 21h. Des traces de coups ont été remarqués sur son visage.

L'enquête a été confiée à la police judiciaire de Cergy.

Vers 2h du matin, les adolescents, qui s'étaient refugiés chez un ami, ont été arrêtés par la police, puis placés en garde à vue "pour des faits d'assassinat".

Quant aux parents de la défunte, ils avaient déjà signalé sa disparition avant l'horrible découverte. 

Ils soupçonnaient une fugue. La réalité était bien pire...