"J'avais une collègue qui pleurait tous les jours" : dans la mode, être odieux, c'est presque la norme
Au diable celles qui s'habillent en Prada ! La plupart des gens n'aiment pas les fashionistas. Pourquoi ? Car dans la Doxa, on s'imagine qu'elles sont affreusement méchantes et imbuvables. Mais est-ce vraiment le cas ?

C'est une question vieille comme le monde… Ou du moins, vieille dans le monde des fashionistas. Les influents Loïc Prigent et PAM Boy se la posaient déjà il y a quelques mois. Et avouons-le, on s'est tous interrogés au moins une fois. Au cinéma, la mode est souvent incarnée par des personnages odieux (cf Le Diable s'habille en Prada). Mais est-ce vraiment le cas ? La rédaction est partie à la rencontre de ceux qui façonnent ce monde et subissent parfois le poids de leur passion.
Les relations entre supérieurs et subordonnés sont souvent le théâtre de cette méchanceté banalisée. Maïlys*, assistante styliste pour des magazines féminins, raconte : "Pas tous les stylistes, mais il y en a qui te prennent un peu pour de la merde quand t'es assistant. Tu vas faire tout ce qu'ils ne veulent pas faire. Pour les shootings, tu prends un nombre énorme de vêtements par rapport à ce que tu vas utiliser" (jusqu'à 4 valises et 12 housses, ndlr). "Et certains stylistes arrivent, s'assoient sur une chaise et te regardent galérer."
Une expérience qui peut vite dégoûter du métier. Meggy, ex-stagiaire marketing horlogerie-joaillerie dans une maison française, raconte : "Humainement ça n'allait pas. Après ça, je n'avais plus du tout envie de continuer dans le marketing, dans la mode, dans cette maison. J'avais une co-stagiaire qui pleurait tous les jours."
Si certains se permettent autant de méchanceté, c'est parce qu'ils savent que vous allez rester. Les places sont rares et chères. Et les attentes deviennent vite irréalistes. Maïlys a même négligé sa santé pour honorer un shooting… jusqu'à faire un malaise. Très malade, elle peine à respirer : "Le styliste que j'assistais était assis en train de boire son café et moi j'étais en train de m'étouffer. J'étais tellement fatiguée que j'ai renversé le steamer sur moi." Après quelques heures, il lui lance : "Tu vas rentrer chez toi bientôt parce que sinon tu vas tous nous contaminer." Elle mettra encore trois heures à partir. Dehors, elle appelle les urgences. "Je suis arrivée chez moi, je me suis évanouie devant ma porte."
Meggy, elle, a dû rater une partie de sa cérémonie de diplôme, obligée par sa manager à rester à un événement… à porter des plateaux. Mais loin de nous l'idée de faire des généralités : il y a des gens bienveillants et des méchants partout. "Je sais que cette personne n'est pas le reflet de l'industrie. Il y a d'autres managers qui ne sont pas comme ça", rassure Meggy. "Dans la mode, l'urgence, l'effervescence du moment, le besoin de rapidité d'exécution peuvent créer un univers toxique."Ce n'est pas la mode qui rend méchant. C'est la pression. "Mais il y a tellement de milieux professionnels qui peuvent l'être. Ce qui fait la différence, c'est les gens."
Merci à Maïlys, styliste freelance, et à Meggy Pyaneeandee, Miss Île-de-France 2016, mannequin et actrice.
*Le nom de Maïlys a été changé.