Le courage chez les enfants doués

Ce sont les adultes, découvrant leur don et revoyant leur enfance avec cet éclairage spécifique, qui se rendent compte, dans le même temps, qu'il leur a souvent fallu beaucoup de courage. Du courage pour affronter certaines situations et certaines périodes de leur vie sans en être trop meurtris ou, du moins, en ne laissant pas leurs blessures entraver leur marche.

Le courage chez les enfants doués
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Il a fallu du courage pour rester fidèle à soi-même, sans se laisser aller à la tentation, de copier ses réactions sur celles des autres, simplement pour éviter de se faire remarquer. Leurs tentatives pour paraître conformes à l'image d'un enfant de leur âge ne donnaient pas longtemps le change, comme un masque mal ajusté qu'il faudrait sans cesse remettre en place. Dès la maternelle, on doit se conformer à un mode d'emploi tout fait, avec les siestes qu'on doit subir, les activités qu'on doit aimer et, très vite, le nombre de copains qu'il faut afficher. Il est alors relativement facile de donner des gages de conformisme, à la condition, toutefois, qu'il y ait des interlocuteurs possibles. Pour un enfant doué, il est pénible d'être le seul à pouvoir mener une conversation normale et sensée.

Ensuite les classes se succèdent, semblables et monotones, l'enfant doué a besoin de courage pour supporter cet inlassable recommencement, du moins c'est ainsi qu'il vit l'enseignement, répétitif à n'en plus pouvoir. Il amasse consciencieusement les bribes des nouvelles informations, pour se constituer un ensemble cohérent, plus facile à retenir.

Le courage de tracer sa route

Dans certaines circonstances, le courage est nécessaire pour être un bon élève, attentif et souvent en tête de classe. C'est parfois une position dangereuse qui expose à des sentiments nocifs et destructeurs comme la jalousie, voire la haine, et de plus en plus souvent, leur conséquence directe : le funeste harcèlementL'enfant doué tient à tracer sa route : surtout s'il est le premier de sa lignée familiale à en avoir la possibilité, il sait que les connaissances sont indispensables, même quand elles sont trop superficielles ; au moins elles indiquent une direction, elles ouvrent une porte qui aurait pu rester ignorée, il ne reste qu'à suivre la piste ainsi amorcée pour approfondir ses connaissances.

Qu'importe si ces domaines sont austères, c'est le courage, soutenu par la curiosité d'esprit, qui guide l'enfant doué, alors que ses camarades sont vite rebutés par des savoirs trop ardus. Parfois, il se demande ce qui le pousse à rechercher la difficulté : il aime l'affronter et la vaincre au lieu de s'en plaindre. Se mettre à l'épreuve ne l'effraie pas, il s'y prépare minutieusement sans se contenter de compter sur la chance. Finalement, il faut du courage pour continuer sa route, trop souvent en solitaire, parce qu'il est rare de trouver quelqu'un qui marche au même pas, dans quelle que situation que ce soit.

Le courage de rester fidèle à soi-même

Quand l'occasion se présente, on la saisit, mais de temps en temps, il ne suffit pas de marcher au même pas, il est préférable que la direction soit la même. Le courage consiste alors à mettre un terme à cet attelage qui ne peut durer longtemps. On peut retrouver un ami d'enfance, mais l'adolescent consterné découvre qu'ils ont pris chacun une orientation différente, tout ce qui les rapprochait s'est effacé, reste seulement les différences, négligeables à l'époque, rédhibitoires maintenant.

Fier, déterminé, faisant parfois figure d'original, et surtout difficile à comprendre, mais possédant aussi un attrait indéfinissable, dont il n'est pas du tout conscient, l'enfant doué resté fidèle à lui-même devient un adulte qui surprend toujours son entourage : il lui est difficilement possible de se conformer à des injonctions implicites ou explicites lorsqu'elles ne lui semblent pas adaptées ou justifiées.  Quand on se bat pour concrétiser un rêve d'accomplissement, on n'a pas le sentiment d'être particulièrement courageux, on rassemble ses forces et on agit en s'appuyant sur elles. C'est avec le recul, lorsqu'on revoit en esprit cette période où il fallait se battre, qu'on se demande d'où on tirait cette force qui n'a jamais déserté : dans l'action, tout paraissait naturel.

Cultiver sa force de caractère

L'élan qui pousse à aller de l'avant sans se laisser aller au découragement peut commencer très jeune :  parfois, des changements de ville, de pays ou simplement d'établissements scolaires avec un environnement social totalement différent exigent un effort intense d'adaptation, dont l'entourage n'a pas forcément conscience : les enfants s'adaptent vite, c'est bien connu, même quand ils changent de civilisation, ou ce qui leur semble tel, tant tout est différent.

La force de caractère s'est exercée, elle devient nécessaire dans certaines circonstances de la vie adulte : il arrive que l'employé d'une entreprise ne soit plus en accord avec la politique de sa société, elle choque sa conception du travail, mais il est bien payé et sa situation est stable. Simplement, il lui est impossible de rester dans ces conditions. Les personnes douées ont un besoin vital de cohérence et d'harmonie. Rester dans une entreprise dont on désapprouve les méthodes est, en fait, impossible, on ne peut pas se trahir soi-même, il faudrait accepter de se scinder en deux personnes, une qui refuse cette trahison sans être dupe des arguments développés par ladite entreprise, et l'autre qui reste au fond d'elle-même fidèle à sa conception de la vie, mais qui pense qu'elle n'a pas le choix si elle veut continuer à mener une existence "normale" et relativement confortable sur le plan matériel.

Ceux qui peuvent se passer de ce confort préfère ne pas se trahir, ils n'hésitent même pas, la conduite à tenir pour rester cohérent s'impose d'elle-même, alors que les conséquences peuvent être catastrophiques, mais il leur est impossible de laisser penser qu'ils sont en accord avec certaines décisions, ce n'est même plus du courage, même si une telle décision y ressemble, c'est une incapacité fondamentale : tout simplement, ils ne peuvent pas sembler cautionner par leur attitude une politique qui les heurte, et pourtant l'inconfort qu'ils ont alors choisi est parfois très difficile à supporter.

Conseils : il est bon de rester attentif aux réactions des enfants en société, il montre déjà sa façon de concevoir la route qu'il choisira de tracer : on ne doit pas confondre rigidité et fidélité à soi-même. Trop de concessions étouffe la personnalité propre.