Conjoint étouffant : que faire pour retrouver de l'air et de l'espace ?
Sabrina Leroy, sexologue et thérapeute conjugal spécialisée dans les troubles de l'attachement, nous donne ses conseils.

Comment réagir lorsque notre conjoint ne nous laisse pas respirer ? La première chose à savoir c'est qu'il est possible de sortir de cette difficulté de couple. Un conjoint étouffant a un trouble de l'attachement. Ce trouble est lié à des insécurités telles que la peur du rejet ou de l'abandon et trouve généralement son origine dans l'enfance. Un divorce, des parents absents, autoritaires ou ne respectant pas l'intimité de l'enfant, un amour parental conditionnel… Autant de traumatismes qui peuvent se répercuter sur la vie affective adulte. Selon Sabrina Leroy, sexologue et thérapeute conjugal spécialisée dans les troubles de l'attachement, cela se traduit par des agissements qui limitent l'espace personnel et l'autonomie du partenaire. Concrètement, une jalousie excessive, un besoin de fusion, l'hyper contrôle des choix de l'autre (vestimentaires, alimentaires…) ou encore un comportement intrusif ou envahissant. À terme, ils peuvent fragiliser la relation.
Sabrina Leroy se souvient d'une patiente qui adorait courir le dimanche matin. C'était son moment à elle, sa bulle d'oxygène. Mais son conjoint insistait pour l'accompagner à chaque fois. "L'autre a l'impression qu'on va l'oublier si on s'amuse sans lui". Pour la thérapeute, il convient de définir des frontières respectueuses, permettant de préserver l'espace personnel de chacun. Elle suggère d'instaurer un agenda partagé dans lequel sont notés les temps individuels : "L'idée n'est pas de demander la permission de sortir mais d'informer l'autre de son planning. Cette transparence est rassurante." Rien n'empêche de sécuriser son partenaire en lui envoyant un message : "Si notre conjoint est angoissé à l'idée qu'on sorte sans lui, on peut l'appeler sur le chemin du retour. Ça permet de rester en lien, de montrer qu'on pense à lui et qu'on prend en compte ses inquiétudes".
Encourager l'indépendance de son partenaire est aussi essentiel pour réduire la dépendance affective et rééquilibrer la relation. "On peut l'inciter à consacrer du temps à ses amis ou à ses passions, notamment pendant nos absences. En lui montrant qu'on est heureux qu'il prenne du temps pour lui, on lui prouve qu'il n'a pas à s'en faire : cette autonomie ne met nullement en péril l'attachement qu'on lui porte." Autre point important comme toujours en amour : la communication. "Il est crucial de partager ses ressentis et ses besoins, de manière honnête et bienveillante" confirme Sabrina Leroy. Le choix des mots a alors toute son importance : un ton agressif ou culpabilisant risquerait de raviver certaines peurs. "Dire à une personne avec un attachement anxieux qu'on ne la supporte plus peut réactiver ses insécurités et aggraver le comportement problématique".
Pour que le message soit entendu, la thérapeute préconise d'utiliser des exemples concrets de paroles ou de comportements qui nous ont mis dans l'inconfort : "Ça peut être 'Je n'ai pas apprécié que tu rentres dans la salle de bain sans frapper" ou "Je suis peinée lorsque tu critiques mon meilleur ami"." Si le partenaire n'évolue pas malgré les efforts communs, il peut être bénéfique de consulter un thérapeute. "Pour la personne qui se sent étouffée, ça permet, dans un premier temps, d'identifier les comportements problématiques et de se sentir légitime. Ça fait déjà du bien". Le travail thérapeutique peut aider à trouver d'autres solutions et à mettre en place des stratégies pour ne pas subir la situation. Dans le cadre d'une relation toxique, cet accompagnement est indispensable pour réussir à en sortir : "Le psychologue mettra en lumière la souffrance et fournira les ressources nécessaires pour prendre la décision de partir."